Le président Joe Biden a rejeté le projet d’accord de près de 15 milliards $ US proposé par Nippon Steel du Japon pour acheter U.S. Steel, établie à Pittsburgh, confirmant ainsi sa volonté de bloquer l'acquisition de l'entreprise sidérurgique la plus emblématique des États-Unis.

«Nous avons besoin que les grandes entreprises américaines représentant la majeure partie de la capacité de production d’acier des États-Unis continuent de mener le combat au nom des intérêts nationaux de l’Amérique», a affirmé M. Biden dans un communiqué vendredi matin. 

Sa décision intervient après que le Comité pour l'investissement étranger aux États-Unis, connu sous le nom de CFIUS, n’a pas réussi à parvenir à un consensus sur les risques possibles pour la sécurité nationale de l’accord le mois dernier. Il a envoyé un rapport très attendu sur la fusion au président Biden. Ce dernier avait 15 jours pour prendre une décision. 

Le comité, présidé par la secrétaire au Trésor Janet Yellen et composé d’autres membres du Cabinet, peut recommander au président de bloquer une transaction. La loi fédérale donne ce pouvoir au président. 

Un responsable américain au courant du dossier, qui a parlé sous couvert d’anonymat, a déclaré à l’Associated Press le mois dernier que certaines agences fédérales représentées au comité étaient sceptiques quant au fait que permettre à une entreprise japonaise d’acheter un sidérurgiste américain créerait des risques pour la sécurité nationale. 

La décision intervient quelques semaines seulement avant que le président démocrate ne quitte ses fonctions et pourrait nuire aux relations entre les États-Unis et le Japon, qui est le plus grand allié des États-Unis en Asie. Le Japon est également le plus grand détenteur étranger de dette américaine. 

Joe Biden s’était déjà prononcé contre l’accord en mars dernier — et avait été soutenu par les United Steelworkers. Le syndicat des Métallos était préoccupé par la question de savoir si l’entreprise honorerait les contrats de travail existants ou réduirait les emplois, ainsi que par la transparence financière de l’entreprise. 

Le président élu Donald Trump s'est également opposé à l'acquisition et a juré en décembre sur sa plateforme Truth Social de bloquer l'accord et d'utiliser des incitations fiscales et des tarifs douaniers pour faire croître l'entreprise.

Vendredi, le président des Métallos, David McCall, a dit que le syndicat était reconnaissant de la décision de M. Biden de bloquer la vente et l'a qualifiée de «bonne décision pour nos membres et notre sécurité nationale».

M. McCall a longtemps mis en doute le statut de Nippon Steel en tant qu'intermédiaire honnête des intérêts commerciaux nationaux des États-Unis et a réitéré cela vendredi, en déclarant dans un communiqué que «Nippon a prouvé qu'il était un tricheur commercial en série». 

M. McCall a insisté sur le fait que U.S. Steel avait les moyens financiers de rendre l'entreprise forte et résiliente.

De son côté, Nippon Steel avait déclaré qu'elle était la mieux placée pour aider l'acier américain à être compétitif dans une industrie dominée par les Chinois et pour investir des milliards dans les installations représentées par les United Steelworkers, y compris les hauts fourneaux vieillissants de l'entreprise. 

Nippon Steel a annoncé en décembre 2023 son intention de racheter le producteur d'acier pour 14,9 milliards $ US en espèces et en dettes, et s'est engagé à conserver le nom U.S. Steel et le siège de Pittsburgh. Malgré cela, sa proposition a suscité des inquiétudes quant aux conséquences de la transaction pour les travailleurs syndiqués, les chaînes d'approvisionnement et la sécurité nationale des États-Unis. 

L’annonce est intervenue dans un contexte de soutien politique renouvelé à la reconstruction du secteur manufacturier américain et après une longue période de tarifs protectionnistes américains qui, selon les analystes, ont contribué à revigorer l’acier national.

Nippon Steel a mené une campagne de relations publiques pour gagner des partisans, offrant même des primes de fermeture de 5000 $ aux employés de U.S. Steel, soit une dépense de près de 100 millions $.

Un nombre croissant de conservateurs et de groupes d'entreprises, comme la Chambre de commerce des États-Unis, avaient publiquement soutenu l'accord, tandis que Nippon Steel commençait à rallier certains membres du syndicat des métallurgistes et les maires des régions situées à proximité de ses hauts-fourneaux en Pennsylvanie et dans l'Indiana.

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