Costas Simitis, ancien premier ministre de la Grèce et architecte de l’adhésion du pays à la monnaie unique européenne, l’euro, est décédé à l'âge de 88 ans, a rapporté le diffuseur radiotélévision publique ERT.

M. Simitis a été transporté tôt dimanche matin de sa maison de vacances à l’ouest d’Athènes vers un hôpital de la ville de Corinthe, alors qu'il était inconscient et sans pouls, a indiqué le directeur de l’hôpital. Une autopsie sera effectuée pour déterminer la cause du décès.

Le gouvernement grec a décrété une période de deuil officiel de quatre jours. Costas Simitis recevra des funérailles d’État.

Des hommages chaleureux sont apparus, et pas seulement de la part d’alliés politiques.

«Je dis au revoir à Costas Simitis avec tristesse et respect. Un adversaire politique digne et noble», a déclaré le premier ministre Kyriakos Mitsotakis dans un message sur Facebook, saluant également le «bon professeur et parlementaire modéré».

Un autre politicien conservateur, l’ancien commissaire européen Dimitris Avramopoulos, a rappelé comment, en tant que maire d’Athènes, il avait coopéré «sans heurts et chaleureusement» avec M. Simitis pour organiser les Jeux olympiques.

«Il a servi le pays avec dévouement et sens du devoir. Il a su faire face aux défis difficiles et a promu des politiques qui ont changé la vie de (nombreux) citoyens», a souligné M. Avramopoulos.

Costas Simitis était le cofondateur du parti socialiste PASOK en 1974. Il est devenu le successeur du chef fondateur du parti, Andreas Papandreou, avec qui il entretenait une relation souvent litigieuse qui façonnait la nature du parti. M. Simitis était un pragmatiste discret, tandis que M. Papandreou était un populiste charismatique et fougueux. M. Simitis était également un pro-européen engagé, tandis que M. Papandreou s’appuyait sur une forte opposition à l’adhésion de la Grèce à ce qui était alors la Communauté économique européenne dans les années 1970, avant de faire volte-face lorsqu’il est devenu premier ministre.

Lorsque les quatre premières années de régime socialiste, de 1981 à 1985, ont entraîné une rapide détérioration de l’économie, M. Papandreou a promu Costas Simitis au poste de ministre des Finances et il a supervisé un programme d’austérité strict. Les finances se sont améliorées, l’inflation a été en partie maîtrisée, mais M. Simitis a été contraint de démissionner en 1987 lorsque M. Papandreou, en vue d’une élection prochaine, a annoncé une politique salariale généreuse, sapant les objectifs du programme d’austérité.

Les socialistes sont revenus au pouvoir avec Andreas Papandreou toujours à la barre en 1993, mais il était malade et a finalement démissionné en janvier 1996. Un vote serré à deux tours parmi les législateurs socialistes a permis à M. Simitis de devenir premier ministre de la Grèce, un poste qu’il a occupé jusqu’en 2004.

Ce dernier a officialisé l’entrée de la Grèce dans la zone euro en janvier 2001. Il a aussi contribué à assurer la tenue des Jeux olympiques d’Athènes en 2004 et a présidé un vaste programme de construction d’infrastructures, y compris un tout nouvel aéroport et deux lignes de métro, pour aider à accueillir les Jeux. M. Simitis a également aidé la Chypre à adhérer à l’Union européenne (UE) en 2004.

Le président chypriote Nikos Christodoulides a salué M. Simitis comme un «leader exceptionnel» qui a mérité une place particulière dans l’histoire non seulement de la Grèce, mais aussi de Chypre.

«Sa voix politique calme, loin du populisme, et son action politique se fondait sur une philosophie de longue date de modernisation et de réforme», a déclaré M. Christodoulides dans un communiqué.

Les critiques de droite et de gauche de M. Simitis ont cependant dénigré son héritage, soulignant la dette après l’adhésion du pays à la zone euro.

L’opposition dans son propre parti et celle provenant des dirigeants syndicaux à la réforme des retraites en 2001 a finalement eu raison du  gouvernement de Costas Simitis. Ce dernier a démissionné de son poste et ne s'est pas représenté aux élections de 2004, cinq mois avant la tenue des Jeux olympiques, plutôt que d’affronter une défaite certaine face aux conservateurs. 

George Papandreou, fils du fondateur du parti socialiste, lui a succédé à la tête du parti et, en 2008, il l'a expulsé du groupe parlementaire PASOK après que les deux hommes se sont affrontés sur des questions politiques, dont la proposition de Georges Papandreou d’organiser un référendum sur le traité de Lisbonne. 

Costas Simitis a quitté le parlement en 2009, mais pas avant d’avoir émis un avertissement prémonitoire que la mauvaise gestion financière placerait le pays sous la tutelle du Fonds monétaire international (FMI), qui imposerait une austérité sévère. En fin de compte, c’est le FMI, conjointement avec l’UE, qui a imposé un régime sévère à la Grèce en faillite en 2010.

Costas Simitis est né le 23 juin 1936. Il était le fils cadet de deux parents politiquement actifs. Son père avocat, Georgios, était membre du «gouvernement» de résistance de gauche pendant l’occupation allemande et sa mère, Fani, était une féministe active.

Costas Simitis a étudié le droit à l’Université de Marburg, en Allemagne, dans les années 1950, et l’économie et la politique à la London School of Economics au début des années 1960. Il a ensuite enseigné le droit à l’Université d’Athènes. Son frère aîné, Spiros, décédé en 2023, était un éminent juriste allemand spécialisé dans la protection des données.

M. Simitis laisse dans le deuil sa femme Daphne, deux filles et une petite-fille.

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Menelaos Hadjicostis a contribué à cette histoire depuis Nicosie, en Chypre.

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